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Billet septembre 2025

S’ouvrir sur le monde, une belle façon d’apprendre et de faire avancer notre société

Déjà la fin de l’été, déjà le début d’une nouvelle session universitaire. J’espère que vous en avez toutes et tous profité pour recharger vos batteries (humaines) et faire le plein de bons moments! Pour ma part, j’ai eu le plaisir de voyager dans le cadre de mon travail pour assister à des congrès internationaux. Lorsque l’on fait de la recherche, un aspect important et, avouons-le, agréable est de pouvoir échanger avec des chercheurs des quatre coins du monde sur des sujets qui nous tiennent à cœur. J’ai envie de partager avec vous quelques échanges riches auxquels j’ai eu la chance de participer.

Lors d’un congrès sur les finances, j’ai assisté à une présentation du Professeur Gaikar Vilas, de l’université de Mumbai, qui avait travaillé sur la formation Open Source. Un des éléments problématiques qu’il soulignait et l’ayant amené à s’intéresser à cette question est le fait que les étudiants arrivaient sur le marché du travail non préparés. Quel choc pour une professeure qui travaille dans un programme où l’on tente au mieux d’intégrer des cas concrets dans nos cours pour aider nos étudiants à lier leurs connaissances académiques au marché du travail professionnel. D’ailleurs, j’en profite pour remercier les entreprises qui nous ont ouvert leur porte pour de tels projets.

En discutant avec ce professeur-chercheur indien, j’ai d’abord compris que nos contextes sont très différents. C’est une évidence, me direz-vous, que l’Inde et le Canada sont distincts. J’en conviens, et j’ai pu mieux le comprendre lors de cette discussion. Par exemple, leur taux de chômage est excessivement élevé, très loin du taux québécois avoisinant les 6% depuis le début de l’année 2025 (Institut de la statistique du Québec, 2025). Pour certains états indiens, ce taux dépassait les 25% en 2022 (Forbes India, 2025). Il est certain que dans un tel contexte, la compétition entre les nouvellement diplômés est élevée et les employeurs peuvent se permettre d’être très exigeants.

J’ai également assisté à un congrès organisé par la Society for Human Ecology (SHE) au cours duquel quelques chercheurs parlaient d’émotions, dont l’éco-anxiété. Lors de sa présentation, la Professeure Mihaela Mihai, de l’université d’Édimbourg, mentionnait une multitude d’émotions que les gens peuvent vivre en lien avec l’écologie : culpabilité, honte, anxiété, horreur, et j’en passe. J’avais déjà eu l’occasion de lire quelques études sur l’éco-anxiété et sur les façons d’aider les personnes à mettre en place des moyens pour réduire ces émotions désagréables. D’ailleurs, si la question vous intéresse, vous pouvez écouter les épisodes du balado : Climate Change and Happiness.

L’approche utilisée par la professeure Mihai se distinguait des études que j’avais consultés par un vent d’ouverture au monde, j’oserais dire. Elle s’est appuyée sur les travaux de Hartmut Rosa (Résonance : Une sociologie de la relation au monde) où le concept de résonance est au centre de sa réflexion. Dans ce contexte, la résonance réfère à des expériences émotionnelles intenses fondées sur des relations durables qui soutiennent de manière fiable la personne dans le monde.

En d’autres termes, en approchant l’éco-anxiété dans une attitude de résonance, on amène les gens à focaliser sur ce qui est fait en faveur de notre planète plutôt que sur ce qui va mal. Cette approche apportait une dimension rafraîchissante à la compréhension du phénomène. Et c’est en comprenant plus en profondeur un phénomène social que l’on peut intervenir de manière plus efficace.

Cette présentation a été suivie d’un débat tout aussi intéressant. Les professeures Léna Silberzahn, de l’université de Maastricht, et Louise Knops, de l’université de Bruxelles, ont argumenté à propos d’une certaine obsolescence de la recherche en regard des changements climatiques. Pour les personnes impliquées en recherche, cela peut paraître presque insultant envers nos efforts, mais ce ne sera pas la première fois qu’on fait face à la critique, n’est-ce pas? Leur propos s’appuie sur l’idée que les problèmes écologiques ne sont pas suffisamment considérés sous une perspective affective (ou émotionnelle), surtout en ce qui concerne les recherches en politiques environnementales.

Un de leurs arguments a particulièrement attiré mon attention : décollectivisation et dépolitisation. Il est de plus en plus attendu de la part des personnes de surmonter et de s’adapter aux crises systématiques par eux-mêmes ou à l’aide de professionnels de la santé. Que ce soit pour les difficultés environnementales ou financières, les entreprises et les gouvernements ont cette tendance à remettre la responsabilité entre les mains des consommateurs et consommatrices. C’est du moins ce que je constate au Québec en ce qui concerne l’endettement. Le discours que l’on peut entendre, c’est que si une personne est endettée, c’est simplement parce qu’elle ne s’est pas renseignée et qu’elle a fait de mauvais choix. La vérité, c’est que c’est beaucoup plus complexe que cela. Je pourrai vous entretenir plus en détails de cela dans mon prochain blogue, à la suite de l’avancement de mes recherches dans ce domaine précis. Je tiens à souligner qu’au Québec nous avons la chance de pouvoir compter sur l’Office de la protection du consommateur qui travaille ardemment à légiférer en faveur du consommateur.

Ce ne sont là que trois exemples de présentations auxquelles j’ai assisté. Dans ces congrès, du moins ceux auxquels j’aime participer, il y a des personnes de différents milieux : scientifique, professionnel, scolaire, gouvernemental, privé, communautaire. Et c’est là que la magie opère, quand la recherche rencontre le terrain. Lorsque la recherche est financée par les deniers publics, il semble normal que la communauté scientifique redonne à la société. Et pour que la recherche soit utile à la société, il devient essentiel que les personnes du terrain travaillent de concert avec les scientifiques. J’ajouterais à cela qu’il devient essentiel de se renseigner sur les pratiques existant ailleurs dans le monde pour s’inspirer des meilleures et éviter les pires. Sur ces paroles, je vous souhaite une belle session empreinte d’ouverture sur les autres.

Jacinthe Cloutier
Professeure agrégée et directrice des programmes de 1er cycle en sciences de la consommation
Département d’économie agroalimentaire et des sciences de la consommation

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